Collecter des données visiteurs sur un salon professionnel est devenu un levier stratégique majeur pour les exposants, les organisateurs et les marques. Badges scannés, formulaires sur tablette, applications mobiles, jeux concours sur stand ou encore QR codes : chaque interaction génère des informations précieuses. Mais depuis l’entrée en vigueur du RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données), la manière d’exploiter ces données doit être repensée. Il ne suffit plus de récolter un maximum de contacts, il faut le faire de manière responsable, transparente et sécurisée.
Comprendre quelles données visiteurs sont réellement collectées en salon
Avant de parler d’exploitation, il est indispensable d’identifier le type de données visiteurs qui circulent lors d’un événement ou d’un salon professionnel. C’est une étape souvent sous-estimée, mais fondamentale pour toute stratégie de data marketing événementielle.
Les données les plus couramment collectées sont :
- Données d’identification : nom, prénom, entreprise, fonction, adresse e-mail, numéro de téléphone.
- Données professionnelles : secteur d’activité, taille de l’entreprise, département, rôle dans le processus d’achat.
- Données comportementales sur le salon : stands visités, conférences suivies, horaires de passage, interactions sur les bornes ou écrans tactiles.
- Données issues d’outils digitaux : interactions avec une application mobile, scans de QR codes, téléchargements de contenus, réponses à des questionnaires.
- Données de qualification commerciale : niveau d’intérêt, maturité du projet, budget indiqué, délais de décision.
Chacune de ces catégories n’a pas le même niveau de sensibilité ni le même statut juridique au regard du RGPD. Plus les informations sont détaillées et permettent d’identifier précisément une personne, plus les exigences sont fortes. L’enjeu, pour un exposant ou un organisateur, est donc de ne collecter que les données réellement utiles à ses objectifs marketing et commerciaux.
Le RGPD appliqué aux salons : les principes incontournables
Le RGPD n’interdit pas la collecte de données visiteurs, loin de là. Il encadre cette collecte et l’exploitation qui en découle, en imposant quelques grands principes que toute stratégie data en salon doit respecter.
- Licéité, loyauté et transparence : la personne doit savoir qui collecte ses données, dans quel but, sur quelle base légale et pendant combien de temps.
- Limitation des finalités : les données ne peuvent être utilisées que pour les objectifs annoncés (par exemple : suivi commercial post-salon, envoi d’une documentation, newsletter).
- Minimisation des données : ne demander que ce qui est vraiment nécessaire. Demander 25 champs sur un formulaire de stand n’est pas toujours justifiable.
- Exactitude et mise à jour : les fichiers doivent être tenus à jour, avec correction ou suppression des données incorrectes.
- Limitation de la conservation : les données ne peuvent pas être gardées indéfiniment “au cas où”. Il faut définir une durée de conservation cohérente avec les enjeux commerciaux.
- Sécurité des données : protection contre les accès non autorisés, les fuites, les pertes ou les piratages.
Sur un salon, ces principes se traduisent très concrètement dans l’organisation du stand, dans le paramétrage des outils de badge scanning, dans la rédaction des formulaires et dans le paramétrage du CRM ou de l’outil marketing automation.
Obtenir un consentement clair et exploitable sur le salon
La question du consentement est centrale pour toutes les actions de prospection commerciale, en particulier par e-mail. Lorsqu’un visiteur fait scanner son badge ou remplit un formulaire sur un stand, l’entreprise doit pouvoir démontrer qu’elle a obtenu un consentement explicite si elle s’appuie sur cette base légale.
Concrètement, cela implique :
- Une formulation claire à proximité du formulaire (papier ou digital) indiquant l’usage prévu des données visiteurs.
- Une case à cocher dédiée pour l’inscription à la newsletter, à des communications commerciales ou à des invitations à de futurs événements.
- Une absence de cases pré-cochées : le visiteur doit effectuer un acte positif.
- Une possibilité de participer à une animation du stand (jeu concours, tirage au sort) sans être obligé d’accepter la prospection commerciale, sauf si le règlement du jeu le précise clairement.
Dans certains cas, l’entreprise peut choisir une autre base légale, comme l’intérêt légitime, notamment lorsqu’il s’agit de relancer un contact BtoB venu spontanément demander des informations sur un produit ou une solution. Néanmoins, pour la prospection par e-mail, obtenir un consentement explicite reste une pratique recommandée, plus sécurisante et plus claire pour le visiteur.
Mettre en place une information RGPD visible et compréhensible
Un salon est un environnement dense, mouvant, parfois bruyant. L’information sur la protection des données doit donc être simple, visible, et adaptée à ce contexte. Il ne s’agit pas d’afficher l’intégralité de la politique de confidentialité sur une kakemono, mais de donner l’essentiel, puis d’orienter vers un contenu plus détaillé.
Quelques bonnes pratiques :
- Afficher, sur les supports de collecte (tablettes, formulaires, bornes), une mention courte expliquant qui collecte, dans quel but et avec quels droits pour la personne.
- Prévoir un QR code renvoyant vers la politique de confidentialité complète sur le site de l’entreprise ou de l’organisateur.
- Former les équipes de stand à expliquer en une phrase simple l’usage des données visiteurs : suivi de la demande, envoi de documentation, invitations à d’autres salons, etc.
- Prévoir, dans le mail de remerciement post-salon, un rappel des droits (accès, rectification, opposition, suppression) et un lien de désinscription clairement visible.
Cette transparence renforce la confiance des visiteurs et réduit les risques de plaintes ou de demandes de suppression massives post-événement.
Structurer la collecte pour une exploitation marketing efficace
Respecter le RGPD ne signifie pas renoncer à exploiter les données visiteurs. Au contraire, une collecte structurée, ciblée et documentée rend les campagnes marketing plus pertinentes et plus performantes.
Sur le terrain, cela passe par :
- Des formulaires pensés pour la qualification : champs sur le type de projet, le délai de décision, l’usage envisagé, le budget approximatif, etc.
- Des tags ou champs spécifiques indiquant le nom du salon, la date, le type d’interaction (conférence, démonstration, rendez-vous planifié).
- La segmentation dès l’import dans le CRM ou l’outil marketing : prospects chauds, leads à nourrir, simples contacts pour veille.
- La mise en place de scénarios automatisés adaptés : remerciement, envoi de ressources complémentaires, suivi commercial personnalisé.
En reliant précisément les données recueillies à un salon donné et aux actions menées sur place, l’entreprise peut mesurer le retour sur investissement de sa participation, ajuster son dispositif pour les futurs événements, et améliorer la qualité de sa relation client.
Assurer la sécurité et la traçabilité des données visiteurs
Une fois le salon terminé, commence une autre phase critique : la centralisation, la sécurisation et la traçabilité des données. Les informations ne doivent pas rester sur des supports épars (tablettes, Excel personnels, cartes de visite dans une boîte) sans contrôle.
Quelques points de vigilance essentiels :
- Transférer rapidement les données des outils de capture (applications de badge scanning, formulaires en ligne) vers un système central sécurisé (CRM, DMP, outil marketing automation).
- Limiter l’accès aux données aux seules personnes qui en ont besoin (équipe commerciale, marketing, service client), avec des droits différenciés.
- Documenter les traitements : qui fait quoi avec ces données, pour quelles finalités, avec quels prestataires.
- Vérifier régulièrement les contrats avec les outils utilisés sur les salons (applications, plateformes d’inscription, scanners de badges) pour s’assurer qu’ils sont conformes au RGPD en tant que sous-traitants.
Cette approche structurée réduit fortement les risques de fuite ou de perte de données, mais aussi les incompréhensions internes sur la façon d’utiliser les informations collectées.
Définir une durée de conservation cohérente après l’événement
Le RGPD impose de ne pas conserver les données plus longtemps que nécessaire. Pour les salons, la durée de conservation doit être pensée en fonction du cycle de vente et de la nature de la relation avec le prospect.
Une pratique fréquente consiste à :
- Prévoir une durée de conservation spécifique pour les données visiteurs collectées lors d’un événement (par exemple 2 ou 3 ans sans interaction, selon la nature de l’offre et le cycle de décision).
- Mettre en place des rappels ou des automatisations pour nettoyer et anonymiser les contacts inactifs au-delà de cette durée.
- Conserver, à des fins statistiques, des données agrégées et anonymisées pour mesurer l’efficacité des salons (nombre de leads, taux de transformation, secteurs les plus porteurs, etc.).
Cette politique doit être documentée dans le registre des traitements et reflétée dans la politique de confidentialité. Elle rassure les visiteurs sur le fait que leurs données ne seront pas stockées indéfiniment.
Transformer les données salon en levier de performance responsable
Lorsqu’elle est bien pensée, la collecte de données visiteurs sur les salons professionnels devient un véritable outil de pilotage pour la stratégie événementielle et commerciale. Les contacts ne sont plus de simples cartes de visite numérisées, mais des profils qualifiés, segmentés, utilisables dans des campagnes ciblées et mesurables.
En combinant pratiques RGPD et marketing événementiel, les entreprises peuvent :
- Améliorer la qualité de leurs leads en posant les bonnes questions au bon moment.
- Personnaliser les communications post-salon, en fonction du niveau d’intérêt et des sujets abordés sur place.
- Mesurer précisément le chiffre d’affaires généré par chaque salon, et donc arbitrer entre différents événements.
- Renforcer l’image de marque en démontrant un sérieux et une éthique dans la gestion des données personnelles.
Exploiter les données visiteurs collectées en salon tout en respectant le RGPD n’est pas qu’une obligation légale. C’est une méthode structurée de travail, qui favorise une relation plus équilibrée, plus transparente et plus performante entre les exposants, les organisateurs et les visiteurs.

